Conjoncture internationale
La reprise de la conjoncture internationale n’a lieu que lentement. Ralentie par les politiques mises en œuvre afin de résoudre les problèmes d’un endettement excessif, qui touche de nombreux pays de l’OCDE, la dynamique de croissance de l’économie mondiale ne devrait se reprendre sensiblement qu’au cours de l’année 2014. Toutefois, le tableau est très inégal selon les régions et espaces économiques. La faible conjoncture de la zone euro continue de freiner la conjoncture mondiale. Il est vrai que la crise de la dette s’est atténuée sur les marchés financiers ces derniers mois, ce qui s’est traduit par la baisse des primes de risque pour les emprunts d’Etat des pays périphériques du sud. Pourtant, en dépit de cette détente, la zone euro n’est pas encore sortie de la récession. Les pays du sud de la zone euro notamment, tiraillés entre l’austérité budgétaire, les profondes adaptations structurelles et les difficultés des banques, continuent de traverser une période difficile. Les charges pesant sur eux ne devraient que très lentement s’alléger. En matière de consolidation budgétaire, un assouplissement du calendrier se profile (c.-à-d. plus de temps devrait être mis à disposition pour réduire le déficit budgétaire), compte tenu de la mauvaise situation économique. L’objectif de l’équilibre budgétaire n’est toutefois pas pour autant abandonné. Dans ce contexte, il faut partir du principe que le niveau d’activité économique va encore décliner dans la zone euro pendant l’année en cours (prévision pour le PIB de la zone: -0,7 %). Une légère progression est attendue pour l’année 2014 (+0,9 %). Les disparités marquées entre les pays vont persister également en 2014, notamment entre ceux qui sont en avance sur le cycle conjoncturel (et moins tributaires d’adaptations structurelles) comme l’Allemagne ou l’Autriche et ceux qui sont à la traîne comme notamment l’Italie, l’Espagne, mais aussi la France.
En comparaison des graves problèmes conjoncturels et structurels de la zone euro, les perspectives conjoncturelles des autres régions du monde sont meilleures. Aux Etats-Unis, le redressement économique a pris de l’ampleur en s’étendant au marché du travail et au secteur de la construction et de l’immobilier, qui a connu une adaptation déjà conséquente. Les dernières mesures de consolidation budgétaire, qui comprennent des augmentations d’impôts et des réductions linéaires (automatiques et uniformes) des dépenses, appelées « séquestration », semblent surmontables sur le plan conjoncturel et ne devraient pas nuire à une lente reprise de l’économie américaine. Au Japon, les perspectives conjoncturelles se sont éclaircies grâce à de fortes impulsions données par la politique économique. Le Japon a mené une politique monétaire très expansive, qui a conduit à une nette dépréciation du yen, relançant ainsi les exportations. Des nouveaux programmes conjoncturels ont également été lancés, au prix d’une nouvelle augmentation de la dette publique. Les pays émergents, quant à eux, ont encore soutenu la conjoncture mondiale durant les derniers trimestres, même si leur dynamique de croissance actuelle est plutôt modérée et inégale selon les pays. Alors que de nombreuses économies asiatiques semblent voir leur rythme d’expansion s’accélérer, les données conjoncturelles concernant la Chine présentent une image en demi-teinte et des pays comme le Brésil ou des pays d’Europe de l’Est ont du mal à sortir du creux de la vague.
Prévisions conjoncturelles pour la Suisse
Dans le contexte de la récession de la zone euro, l’économie suisse se maintient relativement bien; au premier trimestre 2013, elle a enregistré une croissance du PIB nettement positive (+0,6 % par rapport au trimestre précédent). Toutefois, il subsiste toujours un déséquilibre entre une conjoncture intérieure solide et des exportations affaiblies. Les domaines d’activités axés sur le marché intérieur, tels que le secteur de la construction et de l’immobilier, les services publics et divers services privés, profitent de l’immigration continue, du bas niveau des taux d’intérêt et des finances publiques relativement saines (pas de nécessité de déployer des programmes de consolidation budgétaire à grande échelle comme dans d’autres pays) et connaissent une expansion régulière et positive. Par contre, les domaines tournés vers l’exportation comme l’industrie, le tourisme, et en partie le commerce, pâtissent de la récession dans la zone euro et des conséquences de la force du franc**. En outre, si l’économie d’exportation a pu éviter une crise plus grave, c’est surtout grâce au taux de change plancher et à l’effet stabilisateur apporté par divers secteurs robustes et moins sensibles à la conjoncture, comme l’industrie pharmaceutique ou l’horlogerie de luxe.
Si on fait abstraction des variations trimestrielles, l’économie suisse connaît depuis un certain temps (mi-2011) une faible croissance. La hausse, légère mais continue, du chômage (le taux de chômage désaisonnalisé est passé de 2,7 % au début de 2012 à 3,2 % à la fin de mai 2013) est la preuve que la conjoncture, malgré sa grande capacité de résistance, n’est pas épargnée par l’environnement international.
Pour les trimestres à venir, aucun changement fondamental ne se profile pour la situation conjoncturelle en Suisse. Les enquêtes actuelles effectuées auprès des entreprises et des ménages privés montrent que l’opinion est mitigée: ni détérioration sévère, ni amélioration spectaculaire ne sont enregistrées ou à attendre. Dans l’industrie notamment, les appréciations sont plutôt modérées et relativement incertaines, et la planification des investissements marquée par la prudence. Les investissements en biens d’équipement devraient tout d’abord connaître encore un faible développement et décliner en moyenne annuelle en 2013. Les perspectives d’exportations restent modérées vu la récession persistante dans la zone euro. Toutefois, l’industrie d’exportation suisse devrait profiter du fait que les perspectives conjoncturelles sont meilleures hors de l’Europe, notamment en Amérique du Nord et en Asie. La consommation privée et les investissements dans la construction en Suisse devraient continuer, quant à eux, de livrer des impulsions positives à la croissance durant les prochains trimestres.
Dans l’ensemble, le groupe d’experts table sur une croissance du PIB de 1,4 % pour l’année 2013, ce qui correspond dans une large mesure aux prévisions du mois de mars (1,3 %)***. Une relance conjoncturelle de plus grande envergure, comprenant aussi les secteurs d’exportation, est attendue pour l’année prochaine à condition que la conjoncture mondiale soit portée par un vent plus favorable qu’en 2013. La prévision de croissance du PIB suisse de 2,1 % pour 2014 reste inchangée.
Compte tenu des perspectives conjoncturelles modérées, une amélioration de la situation sur le marché du travail devrait encore se faire attendre. En ce qui concerne l’emploi, on n’observe pas de recul, mais une augmentation quelque peu ralentie et différente d’une secteur à l’autre. La lente hausse des chiffres du chômage devrait se poursuivre dans les prochains mois, avant que la tendance ne s’inverse au cours de l’année prochaine grâce à la reprise conjoncturelle. En moyenne annuelle, le groupe d’experts de la Confédération table sur un taux de chômage de 3,3 % en 2013 et en 2014 (prévisions inchangées) contre 2,9 % en 2012.
Risques conjoncturels
La crise de la dette dans la zone euro, et ses conséquences, continuent de représenter le risque conjoncturel le plus sérieux. Malgré l’accalmie sur les marchés financiers, on ne peut pas considérer que la crise est derrière nous. Les pays du sud de l’Europe ne connaîtront pas de sitôt une amélioration économique (structurelle) marquée. Des tensions sociales de plus en plus fortes et des divergences politiques pourraient compromettre les réformes économiques nécessaires dans les différents pays et au niveau européen. Le flou autour de la mise en œuvre de l’union bancaire est aussi à considérer. Des nouvelles phase de nervosité sur les marchés financiers ne peuvent pas être exclues, accompagnées de nouvelles pressions à la hausse sur le franc suisse. Un autre risque affectant l’économie mondiale concerne les pays émergents, pour lesquels une reprise généralisée et vigoureuse de la croissance n’est pas assurée.
Outre les facteurs d’incertitude de l’économie mondiale, la Suisse doit encore surveiller le risque domestique de surchauffe sur le marché immobilier. Si l’on se place dans une perspective historique, les conditions de financement de l’immobilier sont depuis longtemps très favorables, ce qui continue à stimuler la demande dans ce secteur.
*Le Groupe d’experts de la Confédération publie chaque trimestre ses prévisions pour l’évolution conjoncturelle de la Suisse. Les dernières prévisions datent de juin 2013 et sont commentées dans le présent communiqué. La publication trimestrielle du SECO «Tendances conjoncturelles» intègre ces nouvelles prévisions et approfondit certains aspects de l’évolu¬tion conjoncturelle récente. Cette publication est disponible en annexe des numéros de février, d’avril, de juillet et d’octobre de La Vie économique (www.lavieeconomique.ch). Elle peut également être consultée gratuitement au format PDF sur le site internet : http://www.seco.admin.ch/themen/00374/00375/00381/index.html?lang=fr.
** L’évolution des exportations et importations de marchandises de la Suisse en 2013 est influencée par les effets de l’adaptation du système de relevé du commerce extérieur d’électricité entrée en vigueur en janvier 2013. En moyenne annuelle, cette adaptation réduit de 1 point de pourcentage environ en 2013 autant l’évolution des exportations que celle des importations de marchandises. La balance commerciale et l’évolution du PIB ne sont pas concernés par cette adaptation.
***Cette légère adaptation est la conséquence de l’intégration du 1er trimestre 2013 dans les prévisions. L’interprétation de l’évolution conjoncturelle en cours d’année 2013 n’a toutefois pas fondamentalement changé entre mars et juin 2013.
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