Quels sont les défis au niveau international qui attendent la Suisse en matière de réfugiés et de migration?
Il suffit de lire les journaux pour comprendre les enjeux de la situation. C’est la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’il y a autant de réfugiés et de déplacés internes. C’est-à-dire des personnes – et, parmi elles, de plus en plus d’enfants et d’adolescents livrés à eux-mêmes – contraintes de quitter leur patrie à cause des conflits armés ou pour d’autres motifs. Par ailleurs, ce que nous disent les médias n’est que la pointe de l’iceberg: ils ne font par exemple pas état des dizaines de milliers de Sud-Soudanais qui ont fui depuis mi-juillet vers l’Ouganda, l’Éthiopie et le Kenya.
Pour la Suisse, le défi est des plus complexes. Notre pays souhaite en effet garantir la protection nécessaire via le système d’asile. Mais parallèlement, nous voulons aussi assurer la protection sur place, éviter d’autres situations de fuite et, autant que faire se peut, offrir aux réfugiés des perspectives dans le pays de premier accueil. C’est sur ces problématiques que se concentrent la DDC et d’autres acteurs comme le Secrétariat d’État aux migrations (SEM), la Division Sécurité humaine (DSH) du DFAE et le Secrétariat d’État à l’économie (SECO).
Comment le Sommet international sur les réfugiés s’intègre-t-il dans le travail du DFAE?
Les mouvements de fuite auxquels nous assistons aujourd’hui revêtent une dimension mondiale. Aucun pays ne peut prendre seul des mesures durables. C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en œuvre un système de collaboration solidaire à la fois régional et mondial. Le Sommet de l’ONU concrétise certes cette vision, mais il reste encore beaucoup à faire car les motifs d’exode ne vont pas disparaître du jour au lendemain. Cette réalité ne doit toutefois pas nous empêcher d’avancer : si nous ne prenons pas maintenant des mesures à l’échelle internationale pour attaquer le problème à la racine, des millions d’autres personnes seront contraintes de quitter leur pays, dans des conditions souvent extrêmement périlleuses.
Le DFAE dispose de plusieurs instruments pour mettre en œuvre les décisions prises lors du Sommet de l’ONU. À titre d’illustration, l’aide humanitaire et la coopération au développement de la DDC ont pour but non seulement de protéger et de soutenir les réfugiés et les déplacés internes, mais aussi d’offrir des perspectives durables aux populations directement concernées. C’est ainsi qu’un projet de formation professionnelle mené à Kakuma, un camp de réfugiés au Kenya, vise à faciliter l’entrée des réfugiés sur le marché du travail local. Cependant, les programmes d’aide aux réfugiés doivent aussi veiller à intégrer et à soutenir la population locale, afin d’éviter les tensions et de favoriser l’intégration sociale. C’est pourquoi les projets de réhabilitation d’écoles en Jordanie et au Liban financés par la DDC sont également destinés aux enfants locaux.
Parallèlement, la coopération au développement de la DDC s’inscrit sur la durée et entend s’attaquer aux causes des déplacements forcés, en lien avec les initiatives de la DSH en matière de promotion de la paix et de droits de l’homme. Cette démarche inclut le soutien des processus de paix, notamment en Ukraine et en Syrie, de même que les mesures déployées pour mieux faire respecter le droit international public.
Le Sommet de l’ONU est également l’occasion d’envisager de nouvelles formes de collaboration, en particulier avec le secteur privé. La Suisse intégrera davantage cet aspect dans son travail en recherchant des partenariats appropriés avec les acteurs privés. Ceux-ci peuvent en effet aider à plusieurs niveaux, dans le domaine de la migration en général comme dans les situations de déplacements forcés: création d’emplois, mise en œuvre de solutions pratiques telles que l’initiative conjointe «Better Shelter» de l’UNHCR et d’IKEA, ou mise à disposition de technologies, p. ex. dans le domaine de l’informatique ou de l’énergie solaire. En outre, la Suisse continuera d’aider financièrement le Comité international de la Croix-Rouge et les organisations de l’ONU et de soutenir la société civile dans les régions en crise.
Comment les différents acteurs de la Confédération travaillent-ils ensemble?
Ils sont coordonnés par la structure interdépartementale de coopération en matière de migration internationale (structure IMZ). Codirigée par le SEM, la DSH et la DDC, elle regroupe l’ensemble des départements concernés. Il est extrêmement important d’impliquer tous ces acteurs afin de garantir la cohérence de la politique migratoire extérieure de la Suisse et de tenir dûment compte des évolutions au niveau de la politique intérieure. La structure IMZ nous offre en outre un mécanisme qui nous permet d’utiliser stratégiquement tous les instruments de politique extérieure pour atteindre le plus efficacement possible les objectifs de la Suisse en matière de migration.
Les partenariats migratoires constituent un instrument essentiel dans ce contexte: grâce à eux, nous pouvons apporter avec nos partenaires des réponses constructives aux différents défis et mieux utiliser les opportunités qu’offre la migration. La participation de la Suisse aux divers forums du dialogue international sur la migration est elle aussi coordonnée par la structure interdépartementale. Notre pays joue d’ailleurs un rôle actif dans ce type de processus depuis le lancement, il y a quinze ans, de l’Initiative de Berne, destinée à promouvoir le dialogue multilatéral en matière de migration. Un rôle qui reste une priorité de la politique migratoire suisse, afin notamment de renforcer la position de Genève en tant que pôle du dialogue international sur cette question.